Médecine et chirurgie généraleFocus vétérinaires

1 mars 2021

Que sont les calculs urétéraux chez le chat ?

par les Drs Mathilde Aubry, intern au CHV Atlantia, et Hélène Kolb, des services de médecine et imagerie.

Partagez l'article sur

Les calculs urétéraux sont des petits éléments de densité minérale, évacués par le rein et pouvant boucher l’uretère. L’uretère correspond au conduit qui relie chaque rein à la vessie. L’uretère du chat mesure moins d’1 mm : dès qu’un calcul s’engage dans l’uretère, ce dernier risque d’être obstrué. 92% des calculs urétéraux sont obstructifs, on parle alors d’urolithiase avec obstruction urétérale. L’impact sur les reins dépend de leur taille, de leur nombre, et de la durée d’obstruction. L’impossibilité pour le rein à évacuer les urines jusqu’à la vessie, peut conduire à des lésions irréversibles et à un état d’insuffisance rénale.

L’incidence des calculs urétéraux est en augmentation depuis une vingtaine d’année et les chats atteints ont en moyenne 7 ans (1-14 ans). Les calculs obstruant l’uretère sont majoritairement des calculs d’oxalate de calcium à plus 85 %.

Le Sacrée de Birmanie, le Persan et le Siamois semblent prédisposés.
D’autres calculs peuvent être présents dans les reins, la vessie et/ou l’urètre (conduit d’évacuation des urines à partir de la vessie).

Comment faire le diagnostic ?

Des signes cliniques frustes

Les signes cliniques sont souvent frustes et certaines obstructions urétérales sont de vraies découvertes fortuites à la faveur d’examens radiographique ou échographique. Ne vous attendez pas aux fameuses douleurs de coliques néphrétiques rapportées chez l’homme lors de calculs urétéraux : les chats présentent un inconfort abdominal dans moins de 10 % des cas !
Il faut penser à de possibles calculs urétéraux chez des chats qui présentent un abattement, une baisse d’appétit, des vomissements, un amaigrissement, des saignements urinaires (« hématurie ») voire de la déshydratation et de l’hyperthermie (fièvre). Malheureusement ces signes ne sont pas constants, et d’autres maladies peuvent générer ces mêmes symptômes.
Il est également nécessaire de rechercher des calculs urétéraux en cas d’insuffisance rénale aigüe, d’infection ou d’obstruction urinaire.

Analyse biochimique et ionogramme :

Attention, une analyse rénale normale n’exclut pas la présence de calculs urétéraux ! Les analyses sanguines peuvent être normales lorsqu’un seul uretère est atteint, l’autre rein, sain, prenant le relais.
Les analyses sanguines permettent d’évaluer la fonction rénale et d’adapter le traitement médical.
Une numération formule vient souvent compléter le bilan, car une anémie concomitante peut être présente.
Les examens d’imagerie sont incontournables lors de suspicion de calculs urétéraux.

La radiographie abdominale :

Elle a une sensibilité de 81% pour détecter les calculs.
Cela signifie que tous les calculs ne sont pas visibles par radiographie. Leur visualisation dépend de leur composition minérale. Seuls les calculs de struvites et d’oxalate de calcium sont visibles radiographiquement. Ils apparaissent comme des structures de densité minérale, arrondis ou spiculés, situés ventralement aux corps des vertèbres lombaires sur une vue de profil.

L’échographie abdominale :

Elle a une sensibilité de 77% pour détecter les calculs.
Cela signifie que tous les calculs ne sont pas visibles par échographie abdominale. L’échographie abdominale permet d’identifier l’uretère atteint et d’évaluer les conséquences sur ce dernier et sur le rein plus en amont (dilatation pyélique, dilatation urétérale).
Les calculs apparaissent comme des surfaces échogènes nettes associées à un cône d’ombre sous-jacent. Le plus souvent, une dilatation urétérale en amont des calculs est visible. Parfois des signes de pyélonéphrite sont également présents, traduisant une infection rénale.

Quel est le traitement ?

La prise en charge, en première intention, est médicale. Elle consiste à corriger les désordres hydro-électrolytiques identifiés à l’aide des analyses sanguines et « encourager » le passage du(des) calcul(s) urétéral(aux) avec des traitements administrés jour et nuit en hospitalisation (perfusions, gestion de la douleur – analgésie, etc.).

La prise en charge médicale permet une levée d’obstruction dans 15% des cas. En cas de persistance au bout de 48-72H, une intervention chirurgicale est recommandée afin de limiter des séquelles rénales irréversibles.

Plusieurs techniques chirurgicales sont possibles mais l’intervention chirurgicale de choix à l’heure actuelle est la pose de SUB (Subcutaneous Ureteral ByPass). Elle consiste à mettre en place un système de dérivation de l’uretère et permet une normalisation rapide de la perméabilité des voies urinaires avec une bonne tolérance moyen terme.

Quel est le pronostic et le suivi ?

Un suivi radiographique, échographique et biochimique est réalisé à 1 et 3 mois post-chirurgical puis tous les 6 mois.
Selon les études et selon les cas, les médianes de survie peuvent atteindre jusqu’à 949 jours.

Points forts

  • L’obstruction urétérale est une urgence médicale afin de limiter des lésions irréversibles sur le rein.
  • L’association de la radiographie et de l’échographie permet une sensibilité accrue dans la détection des calculs urétéraux.
  • Le traitement médical sur 48h est efficace dans 15% des cas.
  • L’intervention chirurgicale de choix est le SUB.

Références

  • Cannon and Al. Evaluation of trends in urolith composition in cats : 5230 cases (1985-2004) : JAVMA, vol 231, N° 4, August 15, 2007, p570-576
  • Kolb, Testault, Échographie abdominale du chien et du chat. Les Editions du Point Vétérinaire, 2017
  • Kyles and al, Clinical, clinicopathologic, radiographic, and ultrasonographic abnormalities in cats with ureteral calculi : 163 cases (1984-2002) : JAVMA, vol 226, N°6, March 15, 2005. p932-936
  • Kyles and al, Management and outcome of cats with ureteral calculi : 153 cases (1984-2002) : JAVMA, vol 226, N°6, March 15, 2005. p937-944
  • Kyles and al, diagnosis and surgical managment of obstructive calculi in cats : 11 cases : JAVMA, 1998, vol 213 : 1150-1156
  • Maurey C, and al, Calculs urétéraux chez le chat : étude rétrospective de 71 cas (2005-2013), Congrès de L’AFVAC (2014)
  • Palm and Westropp, Cats and calcium oxalate. satretgies for managing lower and upper tract stone disease, Journal of Feline Medicine and surgery (2011) 13, 651-660