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16 mars 2021

L'épanchement péricardique

Par les Drs Mathilde Aubry, intern au CHV atlantia, et Hélène Kolb, des services de médecine et imagerie.

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Qu’est-ce qu’un épanchement péricardique ?

L’épanchement péricardique est une accumulation anormale de liquide dans le sac péricardique, atteignant préférentiellement le chien plus que le chat. On peut identifier 4 types de liquide : un liquide hémorragique (dans la plupart des patients canins), un transsudat, un exsudat voire, dans de rare cas, un liquide chyleux. 

Les étiologies de l’épanchement péricardique sont nombreuses. Chez le chien, dans les 2/3 des cas, elles sont tumorales et 60% de ces tumeurs sont des hémangiosarcomes de l’atrium droit.  L’épanchement péricardique peut être également d’origine infectieuse, métabolique, toxique (intoxication aux anticoagulants), cardiovasculaire ou traumatique. Chez le chien, 20% des épanchements péricardiquess sont idiopathiques.

Le sac péricardique a une extension limitée. Plus le liquide s’accumule, plus le cœur se trouve comprimé. Les parois du cœur droit étant plus fines que celles du cœur gauche, le cœur droit se trouve davantage comprimé. Lorsque la pression au sein du sac péricardique excède celle du cœur (droit), nous parlons de « tamponnade cardiaque » qui génère une insuffisance cardiaque droite. Les conséquences peuvent être dramatiques : hypotension, hypoperfusion et progressivement apparition d’un choc cardiogénique. La tamponnade est une urgence médicale engageant le pronostic vital de l’animal. 

Les chiens de grandes races tels le Golden Retriever, le Berger Allemand, le Dogue Allemand et le Saint Bernard, sont prédisposés à cette affection.

Comment se fait le diagnostic ?

L’examen clinique permet d’avoir une suspicion.

Lors d’épanchement péricardique, le chien peut présenter un abattement marqué, une intolérance à l’effort, des difficultés respiratoires, une distension de son abdomen (« gros ventre »). A l’examen clinique, le vétérinaire peut déceler une tachycardie, des bruits cardiaques assourdis, un pouls fémoral faible, une distension abdominale (lorsqu’un épanchement abdominal est présent), et des muqueuses pâles.

La Radiographie thoracique permet d’avoir une suspicion.

Lors d’épanchement péricardique volumineux, la radiographie montre un cœur de taille très augmentée (cardiomégalie), un contour net de la silhouette cardiaque et une élévation de la trachée. Dans le cas d’une insuffisance cardiaque droite concomitante, on peut également remarquer une veine cave caudale dilatée, une hépatomégalie, une ascite et un épanchement pleural.

L’echocardiographie conduit au diagnostic

L’échocardiographie permet :

  • de confirmer la présence d’un liquide entourant le cœur,
  • d’évaluer les conséquences cardiaques,
  • et d’identifier une cause à la formation de l’épanchement (notamment d’exclure un processus tumoral)

A l’échographie, l’épanchement péricardique apparaît sous la forme d’une bande anéchogène au sein du sac péricardique. Lors de tamponnade cardiaque, le cœur se balance, semble flotter : on parle alors de « swinging heart ». L’atrium et le ventricule droit sont écrasés par le liquide d’épanchement, en état de collapsus. 

L’échographie permet également de traiter l’animal par le biais d’une péricardiocentèse (voir ci-dessous).

L’electrocardiogramme

Il est réalisé en association avec l’échocardiographie afin d’identifier la présence ou non d’un trouble du rythme cardiaque.

Echocardiographie d’un épanchement péricardique responsable d’une « tamponnade »

Quel est le traitement ?

La péricardiocentèse

Le traitement d’urgence passe par une péricardiocentèse sur animal vigile ou sédaté. Il s’agit d’une ponction à l’aiguille du sac péricardique sous contrôle échographique. Le but est de vidanger le sac péricardique dans sa totalité, pour rétablir une fonction cardiaque normale. Elle permet de lever rapidement la tamponnade et donc de retrouver une fonction hémodynamique physiologique. Cette ponction est effectuée sous monitoring ECG. Elle peut être palliative ou curative selon l’étiologie de l’épanchement péricardique.

L’animal est ensuite hospitalisé et mis sous traitements médicaux (notamment sous oxygénothérapie). 

Il est parfois nécessaire de réitérer les ponctions, l’accumulation de liquide pouvant parfois récidiver au bout de quelques jours voire quelques mois.

La péricardectomie

Cette intervention chirurgicale est indiquée lors de récidive d’épanchement péricardique idiopathique, ou pour certaines tumeurs d’évolution lente comme le chémodectome. Elle consiste à retirer une partie ou la totalité du péricarde permettant ainsi d’éviter les récidives et d’extraire la tumeur dans certains cas. La péricardectomie est réalisée le plus souvent sous thoracoscopie. Cette technique chirurgicale permet de réaliser l’intervention chirurgicale de manière « mini-invasive » : le chirurgien entre dans le thorax par 3 petites ouvertures, et retire le péricarde, guidé par une caméra.     

Une analyse histopathologique sur le péricarde est réalisée afin de préciser l’origine de l’épanchement et le pronostic. La chirurgie a pour but d’améliorer la qualité de vie de l’animal lors de récidive d’épanchement péricardique.

Quel est le pronostic ?

Le pronostic dépend de l’étiologie de l’épanchement péricardique :

  • Hémangiosarcome : sombre à court terme
  • Chémodectome : sombre à moyen terme dans le cas où une péricardectomie partielle est réalisée
  • Idiopathique : bon avec 50% de rémission après péricardiocentèse. La péricardectomie est vivement recommandée dans les cas réfractaires.

Points forts

  • L’épanchement péricardique est une accumulation de liquide autour du cœur
  • La tamponnade est une urgence médicale engageant le pronostic vital
  • L’échocardiographie est l’examen de choix
  • Le traitement d’urgence repose sur la réalisation d’une ponction du péricarde sous contrôle échographique (péricardiocentèse)
  • Dans certains cas, une intervention chirurgicale peut être indiquée

Références

  • Jossier R, Fusellier-Tesson M, Laborde A. Affections du thorax. In L’imagerie médicale du chat et du chien au service du praticien (2013) p. 187‑188.
  • Hébert F, Bulliot C. Guide Pratique de Médecine Interne chien,chat et NAC (2018) p. 105
  • Chetboul V., Bussadori C. de Madron E. Chapter 17 Pericardial Diseases. in Clinical echocardiography of the dog and cat (2016) p.266-268