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18 novembre 2021

Dois-je faire stériliser ma chienne ?

Le sujet de la stérilisation chez la chienne, très différent de chez la chatte, est un sujet d’actualité ayant amené à la publication de nombreux articles scientifiques ces dernières années. Il est également difficile à aborder tant il présente d’aspects différents à prendre en compte et tant cette décision peut avoir d’impact sur le reste de la vie de l’animal.

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Par le groupe Anirepro

Le sujet de la stérilisation chez la chienne, très différent de chez la chatte, est un sujet d’actualité ayant amené à la publication de nombreux articles scientifiques ces dernières années. Il est également difficile à aborder tant il présente d’aspects différents à prendre en compte et tant cette décision peut avoir d’impact sur le reste de la vie de l’animal.

Nous essaierons donc ici d’aborder les différents points à prendre en compte dans la décision de la stérilisation. Néanmoins, il est maintenant acquis que stériliser une chienne est une décision à prendre de façon individuelle, toute chienne étant différente. Une consultation chez le vétérinaire pour évaluer les pours et les contres pour une chienne, en particulier, sera donc toujours nécessaire pour prendre la bonne décision.

Répondons dans un premier temps à la question initiale : dois-je faire stériliser ma chienne ? La réponse, dans la majorité des cas sera : oui. La difficulté de la décision est dans la question suivante : oui, mais quand ?

Notons bien qu’il a été précisé « dans la majorité des cas ». Cela signifie, comme nous allons le détailler, que la stérilisation peut être déconseillée dans certains cas.

Voici les différents critères à prendre en compte que nous détaillerons ensuite :

  • La prévention des maladies de l’appareil génital
  • Stérilisation et longévité
  • L’examen clinique et les examens complémentaires de la consultation de pré-stérilisation
  • Les maladies suspectées comme pouvant avoir une incidence augmentée chez les chiennes stérilisées

1. La prévention des maladies de l’appareil génital

La stérilisation est souvent recommandée pour 2 grandes raisons tout à fait valables :

  • La prévention de la reproduction (ainsi qu’éviter les périodes de chaleurs),
  • La prévention des maladies de l’appareil génital : affections des ovaires, affections de l’utérus et affections des mamelles.

Le retrait des ovaires permet, effectivement et en excluant le syndrome de rémanence ovarienne, de supprimer les troubles ovariens et la grande majorité des problèmes utérins. Attention, nous verrons par la suite que, concernant les affections vaginales, la stérilisation peut avoir l’effet inverse.

Jusqu’à maintenant, la stérilisation était fortement recommandée avant les premières chaleurs dans le but de prévenir le développement de tumeurs mammaires. En effet, les publications mettaient en évidence que la stérilisation permettait de réduire le risque d’apparition de tumeurs mammaires à différents pourcentages en fonction du moment d’intervention chirurgicale comme suit (d’après Schneider et al, 1969):

  • avant les premières chaleurs : réduction d’environ 99,5%, 
  • avant les secondes : réduction d’environ 92%,
  • avant les troisièmes : réduction d’environ 76%,
  • après 2,5 ans : pas de diminution du risque.

Cependant, une étude plus récente ayant analysé les données de ces anciens articles montre que ces résultats ne seraient pas complètement fiables (Beauvais et al, 2012). S’il est indéniable que la stérilisation apporte un facteur protecteur contre les tumeurs mammaires lorsqu’elle est réalisée précocement, de nouvelles études plus rigoureuses sont nécessaires pour affiner les chiffres précédemment évoqués.

Les tumeurs mammaires constituent le deuxième type de tumeur le plus retrouvé chez la chienne. Néanmoins, il est important de noter également que dans cette espèce, environ 40% d’entre elles seront de nature bénigne et environ 60% malignes. L’un des critères de malignité étant la taille (les tumeurs de plus 3cm de diamètre ayant plus de risque d’être malignes), il est important d’intervenir le plus rapidement possible dès qu’une masse est palpable dans le tissu mammaire.

Il est donc impératif d’être attentif à sa chienne et de palper très régulièrement ses mamelles (au moins une fois par mois à l’occasion de périodes de caresse) même chez une chienne stérilisée très jeune. 

2. Stérilisation et longévité

Dans la suite de la fiche, nous verrons que plusieurs points négatifs sont associés à la stérilisation. Néanmoins, il reste essentiel de prendre en compte que la plupart des études menées sur les facteurs ayant un impact sur la longévité des chiennes mettent en évidence que les chiennes stérilisées présentent une durée de vie supérieure aux chiennes entières. Par exemple, dans l’étude de Hoffman et al en 2013, les chiennes stérilisées présentaient une durée moyenne de vie de 9,4 ans contre 7,9 chez les femelles restées entières. Les femelles stérilisées avaient une espérance de vie supérieure de 26%par rapport aux femelles entières. De plus, dans la population de cette étude, la cause majoritaire de décés était le développement de cancers dans le groupe des chiennes stérilisées et, dans le groupe de femelles entières, les maladies dégénératives et vasculaires, les infections ou encore les traumatismes. 

Il est important de prendre en considération que l’âge lors de la stérilisation n’était pas pris dans ces études. Ainsi, il est difficile de savoir si stériliser avant ou après la puberté aurait un impact sur la durée de survie.

Une étude récente sur une population de Rottweiller cherche néanmoins une réponse à cette question. Dans cet échantillon de 242 chiennes, l’analyse de survie a montré que les femelles stérilisées ayant eu une exposition ovarienne minimum de 4,3 ans avant l’intervention chirurgicale avaient une longévité plus importante par rapport aux femelles stérilisées précocement (Waters et al, 2017). 

Ainsi, si la stérilisation reste fortement recommandée, il est important de prendre en compte les différents facteurs qui vont être évoqués par la suite pour choisir le bon moment d’intervention et les bonnes candidates.

3. L’examen clinique et les examens complémentaires de la consultation de pré-stérilisation

L’historique de la chienne et l’examen clinique auront un impact sur la décision de stérilisation. En effet, l’un des motifs de la stérilisation est parfois un trouble du comportement. Il est important de noter que ce motif doit représenter, au contraire, une justification de ne PAS stériliser. En effet, nous savons maintenant qu’une chienne agressive pourra parfois développer une agressivité encore plus importante suite à la stérilisation. Il est donc essentiel, avec d’opérer, de consulter un vétérinaire comportementaliste qui pourra caractériser plus précisément l’agressivité et juger de l’intérêt de la stérilisation au cas par cas.

Un historique de lactation de pseudogestation (ou « grossesse nerveuse ») après chaque chaleur est, à l’inverse, un bon motif pour envisager une stérilisation.

L’examen clinique de la chienne permettra d’évaluer plusieurs critères :

  • les fonctions cardio-vasculaires et respiratoires (en vue d’une anesthésie générale),
  • le développement général de la chienne,
  • son développement génital.

Le développement général est essentiel à prendre en compte. En effet, il est maintenant reconnu qu’une stérilisation précoce chez les chiennes prédisposées au développement de troubles ostéo-articulaires augmente le risque d’apparition de ces affections. Ainsi, le format de l’animal et son niveau de développement au moment de la consultation permettront de décider s’il est judicieux d’attendre la fin de la croissance même si cela sous-entent d’attendre la puberté et donc les premières voir les deuxièmes chaleurs.

L’examen de l’appareil génital externe ainsi que la réalisation d’un frottis vaginal sont également impératifs. 

En effet, bien que les données scientifiques restent peu développées sur ce sujet, il est admis dans la communauté de spécialistes que lors de diagnostic de vaginite de la chienne impubère (grâce au frottis) attendre les premières chaleurs reste le meilleur traitement. De la même façon, toute anomalie de conformation de la vulve (vulve infantile ou encapuchonnée) doit amener à la même décision. En effet, ces anomalies persisteront si la chienne est stérilisée avant le développement génital. Elles favoriseront par la suite l’apparition de vaginites voir de cystites chroniques dont le traitement est très souvent décevant.

Ainsi, l’examen clinique permettra de décider si attendre la puberté est préférable au cas par cas et si l’animal est apte à subir une anesthésie générale.

4. Les maladies suspectées comme pouvant avoir une incidence augmentée chez les chiennes stérilisées

L’obésité

La prise de poids est probablement la conséquence la plus communément admise dans la littérature suite à la stérilisation. Il est suspecté que les hormones sexuelles induiraient une baisse de la prise calorique chez la femelle.

Cette prise de poids est très fréquente quelque soit l’âge à la stérilisation et semble plus importante dans les 2 ans qui suivent l’intervention (Lefebvre et al, 2013).  

La prise de poids n’est cependant pas une fatalité et la gestion de l’alimentation après l’intervention sera essentielle pour la contrôler.

L’incontinence urinaire post-stérilisation

Le développement d’une incontinence urinaire post-stérilisation est une des conséquences possibles de l’intervention. Elle est à connaître et à prendre en compte dans la prise de décision. Cette incontinence, toute race confondue, se développe de 3 à jusqu’à 20% des cas selon les études et peut se mettre en place rapidement après la stérilisation ou jusqu’à 10 ans plus tard. 

Il est important de savoir qu’il existe plusieurs facteurs de risque : le format du chien (les chiennes de plus de 20kg étant plus à risque) et sa race. Ainsi, les races suivantes semblent plus affectées : le Doberman, le Boxer et le Rottweiler par exemple.

Certaines études tendent à montrer qu’une stérilisation pré-pubertaire pourrait présenter plus de risque de développer une incontinence post-stérilisation précocement (Pegram et al, 2019). Néanmoins, les différentes études publiées sont parfois contradictoires et il n’existe pas encore de consensus sur l’impact de l’âge à la stérilisation.

Les troubles du comportement

L’impact de la stérilisation sur le comportement est un sujet très important puisqu’il s’agit d’une des raisons pour laquelle l’intervention est justement parfois souhaitée.

Les études récentes montrent que la stérilisation n’a pas forcément un impact bénéfique sur le comportement. Si elle réduit le comportement sexuel, certaines chiennes présenteront un maintien du marquage urinaire et les chiennes ayant un comportement timide à agressif pourraient développer une anxiété plus importante.

La stérilisation ne peut donc être une solution que pour un certain type de comportements bien spécifiques. Il est donc primordial de consulter un vétérinaire comportementaliste avant de prendre une décision de stérilisation dans les cas où le comportement est le motif envisagé.

Les maladies ostéo-articulaires

Les maladies ostéo-articulaires étudiées dans la littérature sont les suivantes : la rupture du ligament croisé antérieure, les dysplasies de la hanche et du coude et les arthrites au sens large. Il est actuellement admis que la stérilisation représente un facteur de risque de développement de ces pathologies chez les races à risque initial, et d’autant plus concernant la rupture du ligament croisé antérieur. De plus, l’âge à la stérilisation semble aussi avoir un impact. 

Ainsi, pour limiter l’apparition de ces affections, il est important de savoir si la race est à risque et si la confirmation de l’animal au moment de la stérilisation est favorable ou non. 

Les cancers

Les études récentes (rassemblées dans le review de Urfer & Kaeberlein en 2019) évoquent une augmentation de la prévalence de différents types de néoplasies chez les femelles stérilisées. Il est important de bien noter que de nombreuses études paraissent régulièrement et semble indiquer que le risque est variable en fonction des races. Cela implique à nouveau que la stérilisation est une décision à prendre de façon individuelle. 

Les néoplasies évoquées sont : les lymphomes, les ostéosarcomes, les hémangiosarcomes et sarcomes cardiaques, les mastocytomes et les carcinomes vésicaux à cellules transitionnelles.

Ainsi, si le Berger allemand ne semble pas présenter une augmentation du risque d’apparition de cancer avec la stérilisation, chez le Golden retriever au contraire on observe, d’après les études, une augmentation nette des mastocytomes et des lymphosarcomes notamment.

Les maladies auto-immunes

Les données sur les maladies auto-immunes sont controversées et nécessitent de plus amples recherches. Néanmoins, il est important de noter que certaines affections semblent plus fréquentes chez les chiennes stérilisées et inversement pour d’autres (Sundburg et al, 2016).

Enfin, l’impact de la stérilisation sur diverses autres maladies (cardiaques ou neurologiques par exemple) n’a pas encore assez étudiée pour que qu’un effet positif ou négatif n’ait pu être établie jusqu’à maintenant. 

Ainsi, si la communauté scientifique maintient que la stérilisation reste souhaitable chez la chienne, il est maintenant recommandé de prendre la décision chirurgicale AU CAS PAR CAS. Il est nécessaire d’en discuter avec le vétérinaire afin de déterminer si ce qui motive la demande de stérilisation est cohérent avec le résultat attendu et savoir si la chienne est une bonne candidate au moment où elle est présentée en consultation. Enfin, l’examen clinique général et génital est indispensable également pour décider du bon moment de la stérilisation

Points clefs

  • La stérilisation est un sujet d’actualité. De nouvelles recommandations sont maintenant accessibles.
  • La prise de décision doit se faire au cas par cas en fonction de la race, de l’âge, de la conformation, des antécédents et des examens cliniques et génitaux.
  • La prise de décision doit impérativement se faire après discussion avec un vétérinaire.